Journée historique ce dimanche 28 mai pour le second tour de l’élection présidentielle en Turquie. Inédite à plus d’un titre, elle est perçue comme un vote de confirmation pour le président sortant Recep Tayyip Erdogan, qui a recueilli 49,52 % des voix lors du premier tour, tandis que son rival Kemal Kilicdaroglu est arrivé en deuxième position avec 44,88 %.

L’enjeu est grand tant la position stratégique et diplomatique d’Ankara suscite convoitises et rapprochements. Erdogan a réussi le pari de rendre son pays incontournable, et sa réélection attendue promet d’inaugurer de nouveaux bouleversements géopolitiques avec en toile de fond le grand conflit autour de l’Eurasie.

Fort du ralliement du troisième homme du 1er tour, Sinan Ogan, de l’alliance ATA, a obtenu 5,17 % des voix, le « faiseur de rois », Erdogan est en très bonne position pour obtenir son quitus pour un nouveau mandat présidentiel. Lundi dernier, Sinan Ogan a décidé, d’appeler à voter pour Erdogan lors du second tour, déclarant « Nous estimons que cette décision est la meilleure pour notre pays et notre nation ».

« Nos négociations ont été conduites autour des principes suivants : le terrorisme sera combattu ; un calendrier sera établi pour renvoyer les réfugiés ; et les institutions étatiques turques seront renforcées », a énuméré Ogan après sa rencontre avec le président sortant. D’ailleurs, le résultat de l’alliance ATA illustre la poussée du vote conservateur à la faveur de ce scrutin qui a donné l’avance au président Recep Tayyip Erdogan.

Lors d’une intervention télévisée hier samedi, le président turc a exhorté la population à aller voter en masse. « Chacune de vos voix est importante. Vos voix sont importantes pour l’avenir de la Turquie », a-t-il déclaré. Et c’est fort de plusieurs atouts qu’Erdogan appréhende le second tour.

D’abord, la haine des médias occidentaux qui l’avaient donné pour perdant dès le premier tour. Cette haine manifeste est révélatrice d’un positionnement politique des capitales occidentales. Celles-ci n’ont pas pardonné au président turc son entente avec Vladimir Poutine et le rapprochement turco-russe avec pour exemple éclatant de cette coopération la négociation-médiation turque pour l’accord céréalier avec la Russie et l’Ukraine, et la création d’un hub gazier au profil de la Russie sur le territoire turc.

Il y a ensuite l’amorce d’un virage géopolitique qui amarrerait la Turquie avec le grand bloc Eurasiatique et la participation de plus en plus active d’Ankara aux travaux de l’Organisation de Coopération de Shanghai et l’entente turco-russo-iranienne à propos du dossier syrien qui sera clôt dès la réélection d’Erdogan.

En effet, la Turquie se transforme de plus en plus en puissance stabilisatrice dans la région : rapprochement prévu avec Damas et règlement du problème des réfugiés syriens, stabilisation du front du Caucase avec l’entente entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, l’entame d’une sortie de crise honorable en Libye. Autant d’atouts géopolitiques qu’Erdogan met sur la table après sa réélection.

Aussi, les relations entre Ankara et les pays arabes se sont normalisés. Plus question d’ostraciser les pays qui ont combattu les résidus du Printemps arabe, tel l’Egypte, les Emirats arabes unis ou l’Arabie saoudite. Une entente se créer afin d’apaiser les relations entre la Turquie et ces pays.

D’ailleurs, les Turcs ont compris la nécessité d’une entente avec les pays arabes méditerranéens comme levier d’un partenariat gagnant-gagnant afin d’éviter toute sanction éventuelle de la part de l’Occident intégral.

Le meilleur exemple n’est autre que l’investissement turc en Algérie avec les projets de Tosyali dans l’aciérie et Tayal dans le textile, respectivement à Oran et Relizane. Le premier projet a permis aux Turcs de contourner l’embargo décrété par Donald Trump contre l’acier turc.

Cette entente bilatérale algéro-turque a été rehaussée deux fois par les visites d’Etat du président Erdogan à Alger, puis du président Tebboune à Ankara. C’est dire l’importance des convergences actuelles entre les deux capitales pour la stabilisation de certains conflits dans le monde arabe, à l’instar de la Libye et de la Syrie.

C’est donc fort d’abord de l’électorat turc et de ses positions diplomatiques audacieuses, que le président Erdogan attend la confirmation de sa réélection à la tête de la Turquie. Quelques heures seulement le séparent de son sacre.

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