La ville russe de Kazan abritera du 22 au 24 octobre en cours le sommet des BRICS+. L’importance de cette réunion est multiple. D’abord, parce qu’elle se tient en Russie, un pays ostracisé par la doxa occidentale sur fond de conflit en Ukraine.

Vladimir Poutine qui assure la présidence annuelle des BRICS donnera la pleine mesure de son autorité symbolique et politique en accueillant ses homologues chinois, indien, sud-africain, iranien, égyptien, émirati et éthiopien, tandis que le président brésilien interviendra par visioconférence.

Kazan est importante également parce qu’une trentaine d’Etats seront également présent, parmi les candidats à l’adhésion. Le plus problématique étant la Turquie, membre de l’Otan qui toc à la porte des BRICS. Enfin, ce 16ème sommet qui se tient dans la capitale du Tatarstan, intervient dans un contexte géopolitique très sensible avec les guerres d’agression sioniste contre la Palestine (Ghaza) et le Liban, tandis qu’un membre des BRICS, l’Iran en l’occurrence est dans la ligne de mire des va-t’en guerre à Tel Aviv.

C’est donc un sommet crucial pour le Sud Global qui risque de redessiner la carte des relations économiques et politiques internationales pour les prochaines années. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En termes de parité de pouvoir d’achat, les BRICS ont déjà dépassé le Groupe des sept (G7). Aujourd’hui, les BRICS représentent 35,6% du PIB mondial, tandis que le G7 en représente 30,3%. Il est évalué que, d’ici 2028, la situation continuera de changer en faveur des BRICS (36,6% contre 27,8%).

Le poids collectif des États membres des BRICS dans l’économie mondiale se chiffre à 58.900 milliards de dollars. Aussi, ces pays occupent plus d’un tiers de la superficie terrestre (36%) peuplé par 45% de la population mondiale (3,6 milliards de personnes), et produisent plus de 40% du pétrole et environ un quart des exportations mondiales de marchandises.

L’enjeu principal à Kazan, c’est de montrer au monde entier, le Sud global en premier lieu, que non seulement l’Occident politique est en déclin irrémédiable, mais surtout que son bras armé financier, le dollar, n’a plus le même magistère qu’autrefois.

Selon l’analyste mexicain Alfredo Jalif Rahme, « Il existe de nombreuses versions de ce que pourrait signifier le lancement de la monnaie des BRICS à Kazan. Il pourrait s’agir du lancement d’un panier composé des cinq ‘monnaies R’ de ses membres initiaux : le real brésilien, le rouble russe, la roupie indienne, le renminbi chinois et le rand sud-africain, qui serait soutenu par des matières premières telles que l’or, le pétrole, le gaz naturel, le blé, l’uranium, etc. ».

Ainsi, cette dédollarisation mise en place est importante pour l’émancipation du Sud global du diktat de l’Occident intégral. Iouri Ouchakov, conseiller du président russe, qui estime que les BRICS représentent les intérêts de la majorité mondiale, va droit au but. « On poursuit les travaux pour améliorer le mécanisme de la Réserve de change éventuelle, principalement en termes d’utilisation de devises alternatives au dollar américain », précise-t-il.

« Nous pensons qu’un objectif important pour l’avenir est la création, sous l’égide des BRICS, d’un système de paiement indépendant basé sur les technologies les plus modernes, telles que les monnaies numériques et la blockchain. Il importe surtout que cela soit confortable pour les États, les populations et les entreprises, sans nécessiter de grandes dépenses ni être politisé », a-t-il conclu.

C’est donc un sommet des BRICS qui se réuni dans des conditions géopolitiques exceptionnelles qui fera date. Le monde géoéconomique de l’après Kazan sera sans doute aussi important que le monde géopolitique après Ghaza.

The post Sommet des BRICS à Kazan : Un tournant pour le Sud global appeared first on Le Jeune Indépendant.