Le Think Thank AWAL-Houriate vient d’organiser à Casablanca une rencontre nationale pour clôturer l’année 2024, dans le cadre de son projet « Pour des familles marocaines, Espaces d’égalité, d’inclusion, de sécurité et de solidarité » mené durant les trois années précédentes 2022/2023 et 2024. Ce projet, pour rappel, a été marqué par la production du mémorandum 2024 intitulé « Familles plurielles : Pour l’égalité au sein des familles et entre les familles », après un processus participatif qui a duré deux ans et comportant une étude de terrain dans plusieurs régions du pays avec l’aide d’experts et universitaires.
Une série de tables rondes et de conférences régionales ont permis de réunir des universitaires, des chercheurs(ses) et des représentant(e)s de la société civile, d’institutions publiques et de diverses instances constitutionnelles pour enrichir les recommandations et permettre la finalisation du mémorandum qui comporte une centaine de recommandations classées en 5 axes, à savoir, la nécessité de produire des données qui documentent les mutations sociales concernant les familles (une recommandation), un Code de la famille qui garantit l’égalité et l’intérêt supérieur de l’enfant (32 recommandations), un Code pénal qui garantit l’égalité et les libertés fondamentales (21 recommandations), des politiques publiques en matière de protection sociale qui garantissent protection et dignité pour toutes et tous (17 recommandations), et des mesures d’accompagnement pour une vision holistique et intégrée de l’égalité (28 recommandations).
Dans son intervention, Mme Nouzha Skalli, présidente de Think-Tank AWAL-Houriates, a tenu à rappeler que « les progrès importants réalisés par le Maroc durant la première décennie de ce siècle couronnés par une réforme majeure de la Constitution ». Mais en même temps, elle a regretté la faiblesse de la mise en œuvre des dispositions très avancées de cette Constitution, notamment durant la décennie qui a suivi son adoption.
Mme Nouzha Skalli a souligné par la même occasion que cette rencontre nationale se tient dans un contexte marqué par des perspectives de réformes législatives majeures et particulièrement l’espoir de voir aboutir le chantier de réforme profonde du Code de la famille dans le sens de l’égalité, chantier lancé par le Souverain lors de son discours du trône de 2022, la commémoration de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et le lancement de la 22ème campagne nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles et l’annonce des premiers résultats du Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) de 2024, qui devraient refléter les mutations sociétales et permettre d’orienter les politiques publiques en renonçant aux stéréotypes de la famille patriarcale.
Par rapport notamment à la réforme de la Moudawana, aujourd’hui entre les mains des Oulémas, Awal invite l’instance chargée de la révision de la Moudawana à repenser le vocabulaire du Code de la Famille, du Code Pénal et de la loi de la Kafala, en supprimant tous les termes humiliants à l’égard des femmes et des enfants, en adoptant une formulation juridique et respectueuse des droits pour prévenir les lectures multiples et les interprétations particulières.
Dans son dossier revendicatif, Awal estime également qu’il est important de consacrer le rôle du nouveau code de la famille dans l’accès aux autres droits humains des femmes figurant dans l’article 19 de la constitution, en particulier les droits économiques ; accorder la priorité à l’intérêt supérieur des enfants, quelle que soit leur situation familiale et éliminer toute discrimination entre eux sur la base du handicap, en application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées ratifiée par le Maroc ; réviser le régime successoral de manière à garantir l’égalité et la justice tout en abolissant l’agnation (taassib) dans le cas de filles uniquement ou d’une épouse sans descendance ; élargir le champ d’application du testament sans exclure les héritiers de bénéfice de la succession ; accélérer la mise en place des deux institutions constitutionnelles, l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination et le Conseil consultatif de la famille et de l’enfance, pour qu’ils puissent remplir pleinement leurs rôles…
H.Z
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