Depuis la victoire de la gauche aux élections législatives en France ayant eu lieu suite à la dissolution de l’Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron, le pays de Molière est à la recherche d’un Premier ministre. Après la parenthèse des Jeux Olympiques, la question se pose avec acuité.
Si le chef de l’Etat français ne semble pas enclin à nommer à Matignon Lucie Castets, choisie par le Nouveau Front Populaire arrivé en tête à ces élections un nom émerge depuis quelques jours pour le poste encore occupé par le démissionnaire Gabriel Attal. C’est celui du maire de Saint Ouen dans la banlieue ouvrière de Paris qui se trouve être issu d’une famille d’origine marocaine, ce qui serait une première dans l’Hexagone.
"Clairement le profil pour l’Elysée" avait réagi sur X (anciennement Twitter), Gaspard Gantzer, l’ancien conseiller sous la présidence de François Hollande au portrait de Karim Bouamrane dans le quotidien allemand Die Welt qui titre "Le Obama de la Seine ("Obama von der Seine"). Un enthousiasme qui pourrait bien renforcer les bruits de couloirs à l’Elysée concernant le maire de Saint-Ouen comme le possible futur Premier ministre, comme l'indiquait la politologue Virginie Martin à La Dépêche du Midi.
Nommer Karim Bouamrane pourrait être l’occasion pour Emmanuel Macron de surfer – encore un peu plus – sur le succès olympique de Paris. Alors très peu connu, "il a été remarqué pour avoir contribué à faire briller la France pendant les Jeux olympiques en faisant de Saint-Ouen la ville hôte des athlètes brésiliens", écrit Le Figaro magazine. Cette réussite lui a notamment valu les honneurs du New York Times.
Issu d’une famille modeste d’origine marocaine, il a grandi à Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis et s’est engagé en politique très jeune, d’abord au sein du parti communiste, auquel il a adhéré pendant vingt ans, tout en menant une carrière d’entrepreneur dans la cybersécurité, notamment dans la Silicon Valley.
En 2014, il rejoint le Parti socialiste et devient rapidement un acteur clé, étant nommé secrétaire national à l’innovation en 2016, puis porte-parole du parti sous la direction de Jean-Christophe Cambadélis. Âgé alors de 47 ans, Karim Bouamrane devient le maire socialiste de Saint-Ouen en 2020.
"Il revendique, des valeurs de gauche sans jamais rougir de défendre des principes comme l’autorité, la sécurité, le patriotisme", souligne Le Figaro magazine. En homme de gauche décomplexé, qui a renforcé, dès le début de son mandat, les effectifs de la police municipale, instauré des mesures strictes contre les rodéos sauvages, et restreint la circulation des mineurs dans l’espace public après 22 heures. L’élu socialiste adopte également une position ferme face à la délinquance et aux trafics de drogue.
Des décisions sécuritaires, en adoptant, en même temps, des mesures progressistes comme la mise en place d’un congé menstruel pour les agentes de la ville. Cette approche de la gauche, alliant fermeté et progressisme, pourrait bien séduire Emmanuel Macron dans sa quête de bâtir une coalition plus large, capable de rallier à la fois la droite et la gauche.
D’autant que Karim Bouamrane dénonce sans détour la violence des propos des chefs de file de LFI. Il s’inquiète particulièrement de la "capacité [de LFI] à communautariser le pays au travers du prisme ethnico-religieux", dans son entretien au Figaro Magazine. Un profil qui correspond en tout point au carcan d’Emmanuel Macron qui imagine le profil du nouveau chef du gouvernement comme "un homme ou une femme, consensuel (le), qui plaise à la gauche comme à la droite tout en offrant, affirme l’Elysée, "un parfum de cohabitation", selon le quotidien de référence Le Monde.
Une hypothèse qui pourrait se concrétiser rapidement puisque l’élu socialiste aurait sollicité des notes de conjoncture à des hauts fonctionnaires et des CV de technocrates pour composer son cabinet. "Karim Bouamrane peut faire partie des profils d’un futur Premier ministre, car il est un élu local, respecté au PS et qu’il peut parler à la droite. Mais rien n’est particulièrement engagé avec lui", confie un proche du Président Macron au journal économique Challenges.