Le 11 décembre 1960 marque un tournant décisif dans la lutte pour l’indépendance de l’Algérie. Ce soulèvement populaire, parti d’Alger et étendu à d’autres villes, a révélé la détermination du peuple algérien à se libérer du colonialisme. En dépit de la répression violente de l’armée coloniale, les événements ont renforcé le soutien international à l’indépendance et coûté la vie à des milliers de citoyens, hommes, femmes et enfants, qui ont sacrifié leur vie pour la liberté.
Ces manifestations ont consacré la rupture entre les partisans de la troisième voie et les tenants de l’Algérie française. La Révolution, qui s’est enflammée pendant quelques jours, a convaincu le monde de la détermination des Algériens à obtenir leur indépendance. La manifestation a été soutenue durant une semaine par des hommes, des femmes et des enfants, sortis pour le même objectif, la liberté.
Les manifestants ont été accueillis par l’armée coloniale avec une sauvagerie inouïe, transformant ce soulèvement en un véritable massacre ; les bilans sont accablants : sur Alger 79 morts et 1 300 blessés et près de 400 personnes arrêtées ; à Oran, 69 morts ont été dénombrés et 19 à Annaba.
Ce jour-là, qui reste gravé dans la mémoire collective, est une date historique de l’Algérie combattante. Des milliers de citoyens sont sortis spontanément pour dire au monde entier que « l’Algérie musulmane » ne baissera jamais la tête devant le colonisateur français. Le 16 septembre 1959, le général De Gaulle a alors prononcé son discours, diffusé sur la RTF (Radiodiffusion-Télévision française), sur l’autodétermination, qui infléchit nettement sa politique algérienne et l’oriente vers la possibilité de négociations et d’indépendance.
En janvier 1960, les partisans de l’« Algérie française » se sont révoltés lors de la « semaine des barricades », du 24 janvier au 1er février, provoquant des affrontements qui ont fait plusieurs morts. Le 10 décembre, à Tlemcen, De Gaulle s’est adressé aux « deux communautés » d’Algérie, appelant à leur coopération pour « construire l’Algérie de demain », affirmant ainsi que la France n’avait en aucun cas l’intention de quitter l’Algérie.
Le général a continué sa route vers Cherchell, Blida, Orléans-ville, où il a été accueilli de manière houleuse, avec des banderoles sur lesquelles étaient mentionnées « Algérie algérienne » et avec des chants patriotiques. On y tenait, pour la première fois, le drapeau algérien. De Gaulle ne pouvait se rendre ni à Alger ni à Oran, en raison du grand élan de manifestations. Un mois plus tard, le 8 janvier 1961, le référendum en faveur de l’autodétermination est approuvé par 75,2 % des votants.
Les barricades de la révolte
Lors de la journée du 10 décembre, plusieurs barrages des forces de l’ordre françaises ont été érigés, notamment à Belcourt et Clos-Salembier, et ce dans le but de bloquer l’élan et la détermination des manifestants. Mais ceci a eu l’effet inverse. La révolte a alors gagné plusieurs autres quartiers. La police a, dès lors, riposté avec des gaz lacrymogènes, avant de tirer à vue.
Le lendemain du 11 décembre 1960 à 9 heures, une vague de manifestants a envahi toute la capitale, « avec la poitrine nue face aux balles de l’armée française, des hommes, des femmes et même des enfants avaient investi les rues ». Le 13 et 14 décembre, la manifestation s’est étendue à Tipasa et Cherchell, jusqu’à atteindre, entre le 14 et le 16 décembre, plusieurs autres villes, aussi bien à l’est qu’à l’ouest du pays : Sidi Bel-Abbès, Constantine, Annaba, Mostaganem et Oran.
Les premières victimes tombées lors de cette manifestation sont deux enfants : Saliha Ouatiki, âgée de 12 ans, tombée sous les balles assassines de la police française le 11 décembre, et Farid Maghraoui, âgé à peine de 10 ans, tombé au champ d’honneur. Face à la résistance du petit Farid, un policier venu lui retirer le drapeau lui a tiré à bout portant, à Diar El-Mahçoul (El-Madania).
Pour rappel, le 3 septembre 1958, en pleine guerre de libération, De Gaulle a annoncé, depuis la préfecture de Constantine, le lancement du « Plan de Constantine ». Ce projet visait à « européaniser » l’Algérie sur les plans économique, social et culturel, malgré une croissance démographique rapide. Dans le contexte de la guerre, il représentait également une riposte politique au FLN.
Ammi Mohamed, un moudjahid octogénaire, raconte cette journée sanglante : « Des slogans résonnaient de partout, ‘’Non à l’Algérie française’’, ainsi que des chants patriotiques tels que ‘’mine Djibalina talaâ saout el ahrar’’ par des hommes dont la voix résonnait très fort ». Il se rappelle parfaitement des moindres détails de cette journée.
Les manifestations du 11 décembre 1960 ont été organisées en soutien au FLN et au GPRA pour l’indépendance de l’Algérie. Après la bataille d’Alger et le démantèlement des cellules du FLN, la population a affronté directement les forces de l’ordre et les parachutistes. Plusieurs quartiers européens, dont la rue Michelet (actuelle rue Didouche-Mourad) et Bab El-Oued, ont été envahis. L’armée française, déjà fragilisée depuis la bataille d’Alger, n’a pas réussi à empêcher cette révolte populaire dans les quartiers européens.
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