Deux organisations patronales suisses s'inquiètent d'une importante pénurie de main-d’œuvre d'ici dix ans avec le départ en retraite de la génération du baby-boom et proposent d'accroître la participation des femmes et travailleurs de plus de 65 ans pour contenir le recours à la main-d'œuvre étrangère.
Selon une étude publiée jeudi par Economie suisse et l'Union patronale suisse, l'offre de main-d’œuvre en Suisse devrait diminuer de 297.000 employés à temps plein d'ici 2035 alors même que 163.000 employés supplémentaires seront nécessaires pour maintenir "la prospérité de ces dernières années", faisant donc ressortir un déficit de 460.000 personnes.
Ces deux organisations patronales, qui ont réalisé ces projections sur la base d'un scénario démographique de l'Office fédéral de la statistique, considèrent donc que "la pénurie de main-d'œuvre sera un grand défi" pour le pays alpin.
"On parle désormais moins de pénurie de main-d’œuvre qualifiée que de pénurie de main-d’œuvre en général", note l'étude, qui souligne que les entreprises ont déjà plus de mal à pourvoir les postes vacants.
Les entreprises suisses ont longtemps disposé d'un important réservoir de main-d’œuvre, mais la situation s'est inversée en 2020 avec le départ progressif en retraite des baby-boomers.
La libre circulation des personnes en provenance de l'Union européenne a également été "un facteur de succès important pour la Suisse", ajoutent les deux organisations patronales.
"Cependant, l'immigration qui en découle préoccupe", reconnaissent-elles.
L'Union démocratique du Centre (UDC), le parti de droite radicale qui est la première formation politique du pays, a régulièrement lancé des référendums populaires concernant l'immigration, dont un récent intitulé "Non à une Suisse à 10 millions d'habitants".
Les deux organisations patronales estiment que "cette approche n'est pas la bonne" non seulement parce qu'elle ignore "l'évolution démographique" mais aussi parce qu'elle menace les relations avec l'UE.
Selon elles, l'accès à la main-d’œuvre étrangère est "crucial". Mais pour que l'immigration reste "le plus socialement acceptable possible", elles suggèrent d'accroître la participation des femmes au marché du travail, "en particulier des mères", qui sont nombreuses à travailler à temps partiel face aux difficultés à trouver des structures de garde abordables.
Mais elles suggèrent aussi "une meilleure utilisation du potentiel des travailleurs de 65 ans et plus" en veillant à ce qu'il soit "financièrement intéressant d'exercer une activité lucrative au-delà de l'âge ordinaire de la retraite".
Le nombre de frontaliers étrangers travaillant en Suisse a plus que doublé en l'espace d'une vingtaine d'années, pour atteindre un peu plus de 390.000 à la fin de 2023 selon l'Office fédéral de la statistique (OFS)
Ils sont actuellement au cœur de tensions entre Paris et Berne concernant leurs indemnités de chômage.