A l’occasion de la commémoration du 76ème anniversaire de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, l’Organisation marocaine des droits humains (OMDH) a réitéré son engagement pour la promotion et la protection des droits fondamentaux des migrants et des demandeurs d’asile au Maroc.
Lors d’une conférence de presse tenue à Oujda mardi dernier en présence du président de l’OMDH, Idrissi Hassan, et de membres du Centre d’assistance juridique aux réfugiés et demandeurs d’asile (Wiam Abderrazak, Fatima Sebbahi…), cette organisation des droits de l’Homme a mis l’accent sur les enjeux majeurs liés à la migration et au droit d’asile au Maroc, formulant une série de recommandations en vue de renforcer les mécanismes de protection des droits humains des migrants et des demandeurs d’asile qui peuvent se retrouver dans une situation vulnérable après avoir été forcés à quitter leur pays d'origine.
Une réalité tenace
Avec plus de 282 millions de migrants et 110 millions de déplacés de force dans le monde, les phénomènes migratoires sont au cœur des préoccupations internationales.
Selon l’OMDH, le Maroc, en raison de sa position géographique stratégique entre l’Afrique et l’Europe, est un acteur clé dans la gestion des flux migratoires, soulignant que notre pays n'est pas seulement un pays de passage, mais aussi d'accueil et de destination pour différents types d'immigration.
Il accueille actuellement environ 140.000 migrants en situation régulière et des milliers d’autres en situation irrégulière. Le pays compte également plus de 18.000 réfugiés et demandeurs d’asile, selon les données de fin octobre 2024 fournies par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
Le Maroc a signé et ratifié de nombreuses conventions internationales relatives aux droits humains, notamment celles concernant les droits des migrants et des réfugiés, comme la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. La Constitution marocaine de 2011 consacre également des principes fondamentaux tels que la dignité, la liberté et l’égalité pour tous, y compris pour les étrangers résidant sur son territoire.
En 2014, le Maroc a adopté une nouvelle politique nationale de migration et d’asile, visant à faciliter l’intégration des migrants et à renforcer la lutte contre la traite des êtres humains. Cependant, malgré ces avancées, des lacunes subsistent, notamment en ce qui concerne la délivrance des cartes de réfugié ou de séjour. Par exemple, seuls 1.780 réfugiés reconnus ont obtenu une carte officielle, un chiffre jugé insuffisant par l’OMDH.
Engagement humanitaire et assistance juridique
L’OMDH joue un rôle actif dans la protection des droits des migrants et réfugiés au Maroc. Elle a mis en place plusieurs centres d’assistance juridique, en partenariat avec le HCR, à Oujda, Nador, Tanger et Casablanca, avec un futur centre prévu à Agadir.
Ces centres fournissent des informations juridiques, accompagnent les demandeurs d’asile dans leurs démarches administratives et luttent contre les expulsions illégales. En 2024, l’organisation a aidé 2.571 demandeurs d’asile, dont 55% sont des ressortissants soudanais fuyant les violences armées dans leur pays.
Les intervenants lors de cette conférence ont tous souligné l’engagement de l’OMDH à continuer à défendre les droits des migrants et réfugiés en collaborant avec des institutions nationales et internationales, en organisant des campagnes de sensibilisation et des formations pour les forces de l’ordre et en menant des interventions pour empêcher l’expulsion illégale de demandeurs d’asile.
« Ce qui fait la force de l’OMDH, c’est qu’elle est une force de proposition», a indiqué le président de cette organisation des droits de l’Homme. Les recommandations de l’OMDH présentées lors de cette conférence en attestent et témoignent de la volonté de construire un Maroc inclusif et respectueux des droits humains universels. Ces propositions ne visent pas seulement à répondre aux besoins immédiats des migrants et réfugiés, mais également et fondamentalement à consolider l’image du Maroc comme modèle régional en matière de gestion humanitaire des migrations et des demandes d’asile.
A la tête des recommandations de l’OMHD figure le renforcement du cadre juridique. Elle a mis en avant l’urgence d’une mise à jour des lois nationales pour répondre aux réalités actuelles des migrations et aux engagements internationaux pris par le Maroc.
Ce renforcement passe essentiellement par l’urgence d’adoption des projets de loi n°17.72 et 17.66. Le premier projet traite de la gestion des migrations, tandis que le second porte sur le droit d’asile. Ces textes visent à instaurer une protection juridique claire pour les migrants et réfugiés tout en alignant les lois nationales sur les normes internationales.
L’OMDH a également plaidé pour l’harmonisation de la législation marocaine avec les conventions internationales ratifiées par le Royaume, tout en soulignant la nécessité d’un cadre législatif pour combattre les discriminations sous toutes leurs formes.
En ce sens, elle a appelé à l’adoption d’une loi spécifique contre la discrimination, le racisme et la haine. Une telle législation établirait des mesures de prévention et des sanctions contre les actes discriminatoires. Elle a aussi mis l’accent sur la nécessité de créer une instance nationale dédiée à la lutte contre toutes les formes de discrimination.
L’amélioration des droits socio-économiques et le droit à une vie digne sont au cœur des recommandations de l’OMDH. Selon elle, les migrants et réfugiés doivent pouvoir accéder sans discrimination à la santé, à l’éducation, au logement et au travail.
Et en vue de protéger les travailleurs étrangers, l’OMDH a recommandé la révision du Code du travail. D’après l’OMDH, cette révision doit garantir que les droits des travailleurs étrangers soient conformes aux normes internationales, notamment en matière de rémunération équitable, de sécurité sociale et de conditions de travail décentes.
En ce sens, elle a appelé l’Etat à ratifier des conventions telles que le Protocole contre le trafic illicite de migrants par voies terrestre, maritime et aérienne; la Convention n°143 sur les travailleurs migrants; la Convention n°189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011); la Convention n°87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (1948) et la Convention 190 de l'OIT (2019) sur la violence et le harcèlement au travail.
Mourad Tabet