Quelle serait notre société si chaque individu se levait non pas seulement pour réussir individuellement mais pour contribuer à un bien commun plus vaste, animé par une conscience collective éclairée ? La question de l’intelligence spirituelle décryptée par l’experte Amal Hihi vient répondre à un monde complexe où le leadership se redéfinit. Selon elle, «les dirigeants d’aujourd’hui ne se contentent plus de diriger ; ils sont appelés à éveiller une conscience collective, en s’appuyant sur les multiples intelligences (ndlr : physique, cognitive, émotionnelle et spirituelle ) qui nourrissent leur vision». La professionnelle décortique la problématique.
ALM : Pourriez-vous nous définir tout d’abord ce que signifie l’intelligence spirituelle ?
Amal Hihi : L’intelligence spirituelle est la capacité de se comporter avec sagesse et compassion tout en maintenant la paix intérieure et extérieure (équanimité) peu importe la situation. Elle se développe en 21 compétences autour de 4 cadrans, à savoir la conscience de soi ; la maîtrise de soi, la conscience universelle et la maîtrise sociale, et la présence spirituelle.
Le premier représente un nouveau niveau de conscience intérieure. Le second consiste à être conscient quelle est notre partie de soi qui est aux commandes, c’est-à-dire l’ego ou le moi supérieur sage et compatissant. Le troisième renvoie à une conscience de l’autre beaucoup plus large. Enfin le dernier consiste à vivre selon les principes universels spirituels.
Quel est son impact sur le leadership et l’intégration dans la politique managériale ?
L’intelligence spirituelle transforme le leadership en une force inspirante, qui va au-delà de la simple gestion. Elle permet au leader d’incarner une vision porteuse de sens, de renforcer la confiance et la résilience et de créer une culture où chacun se sent aligné avec un but commun. Intégrer cette intelligence dans la politique managériale, c’est inscrire l’authenticité, l’intégrité et la conscience collective au cœur des pratiques de l’entreprise. Cela se concrétise par des programmes de développement qui valorisent l’alignement personnel et collectif, par des espaces de réflexion, par des séminaires retraite en résidentiel et par une approche du management qui fédère autour d’un engagement profond. En fin de compte, cette approche ancre l’organisation dans une dynamique puissante et durable, capable de résister aux turbulences du monde moderne tout en mobilisant pleinement le potentiel humain.
Qu’en est-il de la prise de conscience des managers marocains à l’ère de l’intelligence artificielle ?
Les organisations vivent une phase de transformation profonde avec un changement de paradigmes.
De plus en plus de managers marocains réalisent l’importance de cette dimension humaine, à travers les intelligences émotionnelle et spirituelle du leadership, surtout face à l’ascension rapide de l’intelligence artificielle et des technologies. Ils comprennent que, dans un monde où les machines peuvent accomplir des tâches avec une précision inégalée, la véritable valeur ajoutée réside dans l’humanité, dans la capacité à inspirer et à donner du sens. En intégrant l’intelligence spirituelle, ils développent une boussole de sagesse et de compassion éthique pour guider leurs équipes dans les défis de demain, avec l’intention de préserver le cœur même de l’entreprise : l’humain.
Le mot de la fin peut-être…
On naît tous spirituels mais on ne développe pas forcément notre intelligence spirituelle. Et pourtant, elle représente la clé d’un leadership conscient, capable de bâtir des organisations résilientes et profondément humaines. À l’ère de l’IA, elle devient une boussole pour naviguer dans l’incertitude et incarner un modèle de leadership inspirant. Repenser le leadership pour l’adapter à l’écosystème émergent signifie donner un nouveau sens, adopter de nouvelles valeurs, renégocier les principes collaboratifs, changer de mindset. C’est une histoire de choix et de conscience.